Les Actrices et Acteurs

JEAN GABIN : PREMIER PAS

Ironie du sort : celui qui pour rien au monde ne souhaitait devenir comédien va finalement se lancer dans une carrière qui en fera le plus grand de tous. Retour sur la jeunesse de Jean Gabin, de la campagne d’Île-de-France aux revues du Moulin-Rouge.

C’est le 17 mai 1904 que Jean-Alexis Gabin Moncorgé voit le jour, chez une sage-femme du boulevard Rochechouart. Ses parents vivent à Mériel, petit village près de Pontoise, mais sa mère a préféré venir accoucher à Paris. Ancienne chanteuse, Hélène Moncorgé a abandonné un métier qu’elle aimait pour s’occuper de ses enfants (elle en aura sept, dont trois mourront avant l’âge adulte). De son côté, Georges Moncorgé mène une carrière honorable au théâtre et au music-hall, sous le pseudonyme de Gabin. Jean grandira d’abord à la campagne : enfant « difficile », il n’aime rien tant que de faire l’école buissonnière. Mais lorsqu’éclate la Première Guerre, son père rapatrie la petite famille à Paris. C’est là qu’Hélène Moncorgé s’éteindra dans son sommeil un soir de 1918 un drame qui fait soudain basculer l’adolescent dans le monde des adultes.

À l’âge de quinze ans, Jean décide de gagner sa vie. L’école l’ennuie, et il refuse obstinément de suivre les traces de son artiste de père, malgré l’insistance de celui-ci. Georges comprend d’autant moins ce refus que lui-même s’était fait chasser par son père, un artisan charron, lorsqu’il avait osé lui annoncer son intention de se lancer dans le théâtre. Mais aujourd’hui, c’est Jean qui tient tête à son père et refuse de toutes ses forces de monter sur les planches, préférant renouer avec le milieu ouvrier de ses grands-parents. Il sera tour à tour électricien, magasinier, manœuvre – avant que son père, qui n’a pas dit son dernier mot, ne le fasse embaucher d’office aux Folies-Bergère, en 1922. Sensible à l’argument d’un salaire deux fois plus important, Jean capitule « provisoirement », et adopte à son tour le pseudonyme de Gabin. Il va désormais enchaîner les petits rôles dans des pièces ou des revues, et se voit même embauché en 1928 par Mistinguett au Moulin-Rouge. Aussi étonnant que cela puisse paraître aujourd’hui, le jeune Gabin y chante, danse, et joue des sketches comiques…

La petite notoriété acquise par le nouveau venu finit par attirer l’attention des producteurs de cinéma qui, depuis l’avènement du parlant, adaptent à l’écran les succès du music-hall. Après deux courts métrages tournés pour la Gaumont d’après l’un de ses sketches du Moulin-Rouge, Gabin accepte un contrat de trois ans chez Pathé. Il décroche alors le premier rôle de Chacun sa chance, romance dans laquelle il donne la réplique à Gaby Basset, une jeune actrice qu’il a épousée cinq ans plus tôt. Puis il enchaîne avec Méphisto, film dans lequel il tient son tout premier rôle de policier avant de trouver également son premier emploi de truand dans son film suivant, Paris-Béguin, aux côtés d’un débutant nommé Fernandel. Rachetant son contrat avec Pathé, Gabin reprend son indépendance, et joue notamment dans Zouzou le frère adoptif de Joséphine Baker ! Mais si Gabin gagne peu à peu en crédibilité grâce à la quinzaine de films tournés en l’espace de quatre ans, la vraie reconnaissance viendra de sa rencontre avec le réalisateur Julien Duvivier, qui lui offre sa première grande prestation dans Maria Chapdelaine. Et si le rôle de Ponce Pilate dans Golgotha ne correspond guère en revanche au tempérament de Jean Gabin, Duvivier verra juste en faisant de lui le légionnaire ténébreux de La Bandera – un film dont la sortie triomphale marque en 1935 la naissance du mythe Gabin.


GOLGOTHA – Julien Duvivier (1935)
Gabin l’a souvent raconté : c’est avant tout parce que Julien Duvivier tenait absolument à le faire jouer dans Golgotha qu’il a fini par accepter un rôle pour lequel il ne s’estimait pas fait. Cela se passait en 1934, et c’était peut-être la première fois que l’amitié éprouvée pour un réalisateur pesait son poids dans une décision professionnelle – mais ça n’était assurément pas la dernière. 

LA BANDERA – Julien Duvivier (1935)
Après avoir tué un homme, Pierre Gilieth s’enfuit et passe en Espagne, où il s’engage dans la Légion étrangère… (…) Dans le cinéma français d’alors, la mode était aux films de légionnaires, et Le Grand Jeu, de Jacques Feyder, avec Pierre Richard-Willm (1934), était déjà un classique. Celui-ci aurait d’ailleurs dû tenir le rôle de Gilieth. Il revint à Gabin.


L’extrait
La Belle marinière (Harry Lachman, 1932)

JEAN GABIN
S’il est un acteur dont le nom est à jamais associé au cinéma de l’entre-deux-guerres, aux chefs-d’œuvre du réalisme poétique, c’est bien Jean Gabin. Après la guerre, il connait tout d’abord une période creuse en termes de succès, puis, à partir de 1954, il devient un « pacha » incarnant la plupart du temps des rôles de truands ou de policiers, toujours avec la même droiture jusqu’à la fin des années 1970.



En savoir plus sur mon cinéma à moi

Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.

Catégories :Les Actrices et Acteurs

Tagué:

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.