Catégorie : Le Film étranger

LIFEBOAT – Alfred Hitchcock (1944)

En s’attaquant à la réalisation de Lifeboat, Hitchcock relevait un double défi : montrer qu’un suspense psychologique peut se développer dans un espace aussi réduit qu’un canot de sauvetage, et tourner son film uniquement en studio, en installant une barque à bascule dans un immense bassin, devant un écran de transparences. Les deux paris réussis sont à l’origine d’une des œuvres les plus grandioses et les plus originales d’Hitchcock qui compte aussi parmi ses films les plus engagés.

ALL ABOUT EVE (Ève) – Joseph L. Mankiewicz (1950)

Le 23 mars 1950, les Academy Awards (Oscars) sont décernés pour les films sortis l’année précédente. Joseph L. Mankiewicz est l’un des grands triomphateurs de la soirée, puisqu’il obtient, pour A Letter to Three Wives (Chaînes conjugales), l’Oscar du meilleur scénario et celui de la meilleure mise en scène de l’année. C’est une véritable consécration. Trois semaines plus tard, il commence le tournage d’All About Eve, le film le plus célèbre de sa période Fox.

BRINGING UP BABY (L’Impossible Monsieur Bébé) – Howard Hawks (1938)

Un chien, un léopard, une clavicule de brontosaure, une héritière foldingue, un savant ahuri : tels sont les principaux ingrédients de ce grand classique de la comédie américaine, L’Impossible Monsieur Bébé d’Howard Hawks… Quiproquos et poursuites s’enchaînent à un rythme échevelé dans le film où un paléontologue, à la recherche de la pièce manquante du squelette d’un brontosaure, ne trouve dans sa quête qu’une femme riche et extravagante, tombée amoureuse de lui. Humour, élégance, fantaisie : la classe quoi.

MADAME BOVARY – Vincente Minnelli (1949)

Fasciné par Flaubert, Vincente Minnelli ne pouvait qu’être touché par Emma, personnage illogique et complexe, tiraillé entre un monde imaginaire et une réalité médiocre. Le film s’attache aux miroirs et à leurs reflets, qui témoignent de la lente dégradation du rêve : miroir terne dans une ferme, miroirs luxueux qui voient le triomphe d’Emma au bal (sur une valse de Miklós Rózsa). Et, à la fin, miroir brisé dans la chambre d’hôtel du médiocre adultère. Les mouvements d’appareil sophistiqués, dignes de Max Ophuls, accompagnent l’accession illusoire d’Emma à un autre monde.

GRAND HOTEL – Edmund Goulding (1932)

Au début des années 1930, un nouveau style s’imposait dans le monde cinématographique. Il procédait de la volonté de réunir le plus grand nombre possible de vedettes dans un même film, et allait donner les fameuses « parades d’étoiles ». Le modèle du genre, c’est-à-dire – selon les critères de Hollywood – celui qui allait obtenir le rendement commercial maximal, fut le film Grand Hôtel, réalisé par Edmund Goulding et produit par la MGM. C’était la première fois qu’une affiche réunissait, dans un même film, une distribution aussi pléthorique de grandes gloires de Hollywood et dans des rôles d’égale importance.

SPELLBOUND (La Maison du docteur Edwardes) – Alfred Hitchcock (1945)

En préparant Spellbound (La Maison du docteur Edwardes), Hitchcock était certain de deux choses : il voulait réaliser le premier film sur la psychanalyse, et il voulait travailler avec Ingrid Bergman. Du premier impératif naquit une œuvre mêlant avec brio conflit psychologique et intrigue policière, grâce notamment à la collaboration du peintre Salvador Dali. Du second jaillit une magnifique histoire d’amour galvanisée par l’attention toute particulière que le réalisateur portait à son actrice. Il en résulta une des plus grandes œuvres d’Hitchcock et un extraordinaire succès auprès du public comme de la critique.

THE MISFITS (Les désaxés) – John Huston (1961)

Après son divorce, Roslyn rencontre Gay, un cow-boy désabusé qui lui propose de partir à la campagne. Une fois au vert, ils retrouvent Perce, un champion de rodéo aussi fêlé qu’eux. Roslyn comprend alors avec horreur que les hommes ne sont là que pour tuer des chevaux sauvages… Arthur Miller a composé la partition de cette tragédie pour son épouse, Marilyn Monroe, qu’il s’apprêtait à quitter. Autobiographie se confond ici avec autodafé. Alors que l’écrivain ne frémit plus devant sa femme mythique, il lui offre paradoxalement le plus beau rôle de sa vie.

ODD MAN OUT (Huit heures de sursis) – Carol Reed (1947)

Il ne faut manquer aucune occasion de (re)découvrir les films de Carol Reed, un cinéaste maintenu dans un oubli incompréhensible. Voici l’un des plus prenants et surprenants. Situé en Irlande à une époque volontairement imprécise, il commence sur les chapeaux de roues, en pleine réunion d’un groupe d’hommes préparant un coup pour « l’organisation ». Dans cette attaque d’une usine, dont les coffres sont vidés, le chef du groupe, Johnny, est blessé, et ses camarades s’enfuient sans lui. Une chasse à l’homme commence alors. Qui retrouvera Johnny, la police ou l’organisation ? Tout en menant un récit haletant, Carol Reed livre ainsi une fable politique sur l’engagement, la solidarité. Tourné juste après la guerre, le film évoque bien sûr la Résistance, mais aussi tous les combats pour la liberté. Dans sa dernière partie, il prend même des allures de conte de Noël, dans un décor de neige aussi poétique qu’émouvant.

KIND HEARTS AND CORONETS (Noblesse oblige) – Robert Hamer (1949)

Pour les spectateurs d’aujourd’hui, Kind Hearts and Coronets (Noblesse oblige) représente sans doute la quintessence de l’humour britannique et l’œuvre peut-être la plus représentative d’une époque où le cinéma anglais a brillé de tous ses feux. Quant aux réserves qu’ont pu émettre certains critiques, à propos de l’importance prépondérante des dialogues, elles nous paraissent aussi dénuées d’objet que la vieille querelle des théoriciens soucieux de trancher entre ce qui appartient à la littérature et ce qui est d’essence purement cinématographique.

STAGE FRIGHT (Le Grand Alibi) – Alfred Hitchcock (1950)

Eve est prête à tout pour prouver l’innocence de son ami Jonathan, surtout s’il s’agit de jouer la comédie. N’est-elle pas actrice ? Mais elle n’est pas la seule et le monde ressemble à un grand théâtre… Après un mélodrame en costumes d’époque, Under Capricorn (Les Amants du Capricorne), Hitchcock revient en cette fin des années 1940 à ses amours de jeunesse. Sa nouvelle œuvre a pour cadre Londres et s’inscrit dans la droite ligne des grandes comédies de sa période anglaise. Au-delà de son caractère léger, Stage Fright (Le Grand Alibi) s’offre à nous comme une réflexion sur le théâtre, galvanisée par une distribution brillante, où le rire est rythmé par le suspense.

SABOTEUR (Cinquième colonne) – Alfred Hitchcock (1942)

A Los Angeles, Barry Kane est accusé de sabotage. Il ne pourra prouver son innocence qu’en démasquant le coupable, au terme d’une longue course-poursuite et d’un combat pour la vérité, contre les apparences… Après avoir tourné quatre films en deux ans, Hitchcock se lance à la fin de 1941 dans une production à la fois plus personnelle et plus audacieuse : il réalise Saboteur (Cinquième colonne), qui rappelle The 39 Steps (Les Trente-Neuf Marches) et annonce déjà North by Northwest (La Mort aux trousses). Avec ses 49 décors et ses 1 200 figurants, ce nouveau film est tourné au moment de rentrée en guerre des Etats-Unis, dont il brosse un portrait à ce moment-clé de la Seconde Guerre mondiale.

CASABLANCA – Michael Curtiz (1942)

Certains des grands films de l’histoire du cinéma donnent l’impression qu’ils étaient destinés dès le début à être tels quels, qu’ils n’auraient pu être interprétés différemment ou mis en scène par quelqu’un d’autre. Et pourtant, parfois, un film n’aurait en rien dû être tel que nous le connaissons tous. Et c’est bien le cas de Casablanca…

NINOTCHKA – Ernst Lubitsch (1939)

On en connaît le thème, repris en 1957 par Rouben Mamoulian dans la comédie musicale Silk Stockings (La Belle de Moscou) : la conversion d’une austère jeune femme soviétique aux charmes de l’amour et des sociétés capitalistes. e rire de Garbo (Garbo laughs !), survenant après tant de rôles tragiques, joua un rôle considérable dans la promotion du film. Le séjour que fit Lubitsch à Moscou en 1936 est-il pour beaucoup dans l' »acidité » de cette satire ? Le cinéaste demeura trop discret sur son voyage pour qu’on puisse l’affirmer, mais le film s’est certainement enrichi de cette expérience.

I CONFESS (La Loi du silence) – Alfred Hitchcock (1953)

Alors qu’il est suspecté du meurtre de Vilette, le père Logan n’aurait qu’à parler pour se laver de tout soupçon et éviter la vindicte populaire. Mais un prêtre ne rompt pas le secret de la confession… En tournant I Confess (La Loi du silence), Hitchcock réalisait un projet qui lui tenait à cœur depuis des années. S’inspirant d’une pièce de Paul Anthelme, il transposa le thème qui lui était cher du transfert de culpabilité dans l’univers catholique de la ville de Québec. Le réalisateur tourna presque tout le film en extérieur, mêlant habilement un environnement réaliste et une image fortement teintée d’expressionnisme.