Le Film Noir

THE GARMENT JUNGLE (Racket dans la couture) – Vincent Sherman (1957)

Vincent Sherman remplaça le metteur en scène Robert Aldrich le 4 décembre 1956, cinq jours avant la date prévue pour la fin du tournage – seize jours avant la fin effective. Aldrich affirma n’avoir jamais vu le film achevé et ne pas savoir combien de scènes, dirigées par lui, furent conservées. Réalisé à la fin du cycle noir, The Garmet Jungle met en scène le traditionnel vétéran désabusé dans un style cinématographique très caractéristique d’Aldrich.

Au début du film Alan Mitchell est un personnage incertain et inefficace manipulé tour à tour par son père, ou ses hommes de main, et par Renata, l’organisatrice du syndicat. Celle-ci attire Mitchell hors du monde semi-insulaire de la mode, Mitchell étant à la fois fasciné et horrifié par les révélations qu’elle lui fait, Aldrich modifie ses compositions et utilise alors des angles de prise de vue plus fermés, des éclairages verticaux ou latéraux dont les ombres projetées sur le visage du protagoniste accentuent son irrésolution. Mitchell est dès lors en butte à la colère d’Artie Ravidge qui avec ses dents blanches brillant dans sa figure grêlée de petite vérole, incarne tous les dangers du monde noir. Ce personnage de « méchant » quasi-satirique et archétypal étaye, en quelque sorte, la sensibilité libérale de Mitchell mais le fait que Ravidge. pour garder les gens à distance, doive les menacer du bout brûlant de sa cigarette, prouve qu’il est sans doute plus efféminé et plus vulnérable qu’Il n’y paraît.

Les conflits sont soulignés visuellement Par plusieurs indices, ainsi le ventilateur au plafond qui métaphorise le thème cher à Aldrich du chaos grondant sous l’apparence lisse des choses. Tandis que les séides de Ravidge s’approchent d’un syndicaliste, un plan moyen en contre-plongée révèle le réseau d’ombres distordues du ventilateur sur le mur voisin. Visuellement, l’image fait planer une menace que la violence de Ravidge soutient au niveau narratif. Les meurtres de Renata et de Walter Mitchell, de même que le sombre gouffre de l’ascenseur où tombe l’associé de Mitchell au début du film, rappelle, avec une simplicité horrifiante, la menace toujours présente de la mort. Mais dans la séquence finale, la victoire d’Alan sur Ravidge affaiblit quelque peu ce motif. Pourtant Mitchell se retrouvera bientôt si absorbé par ses affaires qu’elles l’annihileront aussi bien qu’aurait pu le faire Ravidge , le film s’achève, non sans sarcasme, sur le plan d’une standardiste débordée, informant son correspondant que « M. Mitchell est occupé ».


L’histoire

Alan Mitchell (Kerwin Mathews), au retour de la guerre de Corée, retrouve son père Walter (Lee J. Cobb) qui est à présent veuf. II s’associe à son entreprise de couture. L’industrie du vêtement est soumise à la pression des syndicats qui veulent signer des contrats avec les boutiques. Alan soupçonne que tous ces bouleversements sont liés à la mort de l’associé de son père, tombé dans une cage d’ascenseur. Alan reproche à son père son entêtement à refuser de collaborer avec les syndicats ainsi que sa liaison avec une jeune acheteuse, Lee Hackett (Valerie French). Il finit par apprendre que Walter finance un groupe dirigé par Artie Ravidge (Richard Boone) qui s’évertue à briser l’action des syndicats. Alan décide d’aller au syndicat pour obtenir des informations sur Artie Ravidge et ses hommes. Il y rencontre Tulio Renata (Robert Loggia) et sa femme Theresa (Gia Scala). Les arguments de Tulio pour la syndicalisation de la profession sont tout aussi irrationnels et viscéraux que ceux de Walter Mitchell contre.

Tulio, jouant sur le libéralisme d’Alan, lui demande de l’aider à organiser les travailleurs de la société Mitchell. Alan tente de convaincre son père, sinon de se syndiquer, du moins de rompre avec Ravidge. Walter refuse une fois de plus et rapporte la discussion à Ravidge. Tout ceci aboutit au meurtre de Tulio, assassiné dans une rue obscure près de chez lui. Alan prend dès lors des positions plus radicales et promet de prouver que Ravidge (et peut-être même son père) est impliqué dans le crime. Quant à Walter, ébranlé par la violence de Ravidge, il tente de prendre ses distances avec le truand mais est tout simplement assassiné par ses tueurs. Alan, qui avait déjà pris en charge Theresa et son enfant se trouve désormais à la tête de la firme Mitchell mais il n’a toujours pas de preuves contre Ravidge. Lee, libérée de sa promesse de secret par la mort de Walter avoue à Alan qu’elle détient des documents prouvant qu’il a financé l’action de Ravidge. Les papiers sont remis au procureur et Alan, donnant libre cours à sa hargne, va se battre avec Ravidge. Leur lutte est interrompue par l’arrivée de Theresa et de la police.


LE FILM NOIR
Comment un cycle de films américains est-il devenu l’un des mouvements les plus influents de l’histoire du cinéma ? Au cours de sa période classique, qui s’étend de 1941 à 1958, le genre était tourné en dérision par la critique. Lloyd Shearer, par exemple, dans un article pour le supplément dominical du New York Times (« C’est à croire que le Crime paie », du 5 août 1945) se moquait de la mode de films « de criminels », qu’il qualifiait de « meurtriers », « lubriques », remplis de « tripes et de sang »… Lire la suite



THE RACKET (Racket) – John Cromwell (1951)
La corruption dans Racket n’est pas une entité abstraite : elle est le produit de désirs, d’ambitions et de compromis qui agitent la ville entière : le film ne fait d’ailleurs aucune distinction moralisatrice entre le bien et le mal. Les personnages, même les pires, ne sont pas fondamentalement mauvais, sadiques, ou vraiment dangereux.


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