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[la IVe République et ses films] LA QUALITÉ – LE CHARME VÉNENÉUX D’AUTANT-LARA (7/10)

Durant toute sa carrière, Claude Autant-Lara s’est distingué par un style élégant mais aussi corrosif, mêlant satire et rigueur formelle. Ses films oscillaient entre réussites marquantes (La Traversée de Paris, L’Orgueil) et œuvres plus discutées (Le Bon Dieu sans confession, Le Joueur). Entouré d’une équipe fidèle (Aurenche, Bost, Douy, Cloërec), il a imposé une exigence collective qui, parfois, enfermait ses sujets dans un carcan technique.

[autour d’un film] L’ART DU SCANDALE

Dans un intérieur bourgeois, une jeune femme à la longue chevelure blonde et aux reins cambrés s’appuie contre un bureau, la jupe outrageusement relevée : face à elle, un quinquagénaire élégant la fixe. Cette image, l’une des plus célèbres du cinéma français des années 1950, est si frappante que, près d’un demi-siècle plus tard, tout le monde la connaît encore (le plus souvent sans avoir vu le film dont elle est extraite)

FRIC-FRAC – Maurice Lehmann – Claude Autant-Lara (1939

Marcel, un employé de bijouterie naïf et amoureux fournit sans le savoir de précieuses informations à un couple de malfaiteurs, Loulou et Jo, qui préparent un casse. Voilà un film typique de ces adaptations de pièces de théâtre qui furent légion dans les années 1930 et laissaient la part belle aux acteurs. Le scénario, bien mince, est sublimé par le trio magique des interprètes. Les comédiens prononcent des dialogues savoureux qui mêlent parler populaire et langage plus châtié.

LE STYLE AURENCHE ET BOST 

Duo vedette du scénario durant trois décennies, Jean Aurenche et Pierre Bost ont écrit à quatre mains une soixantaine de films, dont plusieurs chefs-d’œuvre. Torpillés par la Nouvelle vague, ils seront réhabilités par Bertrand Tavernier qui fera de Jean Aurenche l’une des principales figures de son film Laissez-passer en 1992.

LA POLITIQUE DU CINÉMA FRANÇAIS

A la fin de la guerre, le cinéma français fut profondément réorganisé. Les institutions vichyssoises, dont la principale était, dans ce domaine, le C.O.I.C., étaient condamnées à disparaître. La nécessité d’une réorganisation du cinéma ne fut en elle-même jamais remise en cause, et il ne s’agissait que de procéder à un changement des structures. Encore ce changement ne fut-il pas immédiat et s’opéra-t-il en plusieurs temps.

CLAUDE AUTANT-LARA : LE BOURGEOIS ANARCHISTE

Claude Autant-Lara a été un des grands cinéastes français de la période 1940-1960. Il en a donné maintes fois la preuve, c’est un artiste et il sait ensuite injecter une méchanceté toute personnelle à ce qu’il veut dénoncer et user du vitriol. Son œuvre est inégale et comporte une inévitable part de films sans intérêt. Mais on lui doit quelques chefs-d’œuvre et une bonne dizaine d’œuvres importantes qui suffisent à faire de lui le pair d’un Clouzot, d’un Becker ou d’un Grémillon.

TROIS HOMMES DU MILIEU (par Philippe Carcassonne)

Dans les années 1950, le film noir français découvre l’envers d’une morale. Si l’on entend par « cinéma noir » non plus la marque d’un genre, mais l’esprit même de la noirceur, ce goût très français – jusqu’à la complaisance – de l’ignominie morale, sociale ou psychologique, c’est presque toute la production d’avant la Nouvelle Vague qu’il conviendrait de dénommer ainsi.

L’AUBERGE ROUGE – Claude Autant-Lara (1951)

Au XIXe siècle, un couple d’aubergistes assassine ses hôtes. Criminelle mais chrétienne pleine de foi, la patronne se confesse à un moine de passage. Ce dernier réussira-t-il à sauver les voyageurs d’une diligence ? Inspiré d’un fait divers, ce film truculent et sulfureux reste un pied de nez aux bienséances de l’époque et à son propre producteur, un marchand d’armes persuadé de financer une œuvre morale ! Comme le raconte le scénariste Jean Aurenche, il fut interprété à contrecœur par Fernandel, « terrorisé par ce qu’il devait jouer sans vraiment le comprendre ». Claude Autant-Lara s’était fait une mission de tremper son récit dans l’irrespect. La censure exigea la coupure d’une réplique où les gendarmes étaient comparés à des grains de poussière, le clergé se fâcha, les idéologues de la Nouvelle Vague dénoncèrent le film comme symbolique de la tradition du mépris qui gangrenait le « cinéma de qualité ». Cette satire, un des meilleurs films d’Autant-Lara, bénéficie du talent ravageur d’Aurenche et de Bost, experts en cocasserie et en répliques dérangeantes. [Nagel Miller – Télérama]

LE CINÉMA FRANÇAIS SOUS L’OCCUPATION

Dès 1940, les Allemands entendent contrôler l’industrie cinématographique de la France occupée, et, surtout, favoriser l’exploitation de leurs propres films. Le cinéma français connaîtra pourtant une exceptionnelle vitalité. En juin 1940, après les quelques semaines de combats qui suivirent ce que l’on a appelé « la drôle de guerre », les Allemands occupent Paris, Le gouvernement du maréchal Pétain s’installe à Vichy, au sud de la Loire, et la France, coupée en deux, peut apparaître désormais comme un élément de l' »Europe nouvelle » en cours d’édification…