Portée par deux valeurs sures de la Fox, Alice Faye et Don Ameche, cette comédie musicale de 1941 confirme la percée de l’étonnante Carmen Miranda, tornade venue du Brésil.

Lorsqu’elle initie le projet de That night in Rio (Une nuit à Rio), la Twentieth Century Fox sort le grand jeu. Deux des plus grandes stars du studio, Alice Faye et Don Ameche, se voient réquisitionnées pour jouer une nouvelle fois les amoureux chantants et la réalisation du film est confiée à Irving Cummings, l’un des spécialistes du « musical » à la Fox – on lui doit par ailleurs de succès comme Down Argentine way (Sous le ciel d’Argentine), Springtime in the Rockies et Sweet Rosie O’Grady (Rosie l’endiablée)… Tournée en studio et bénéficiant de l’éclat du Technicolor, cette romance mâtinée de comédie promet au public divertissement et évasion. Cette promesse sera tenue, en grande partie grâce aux apparitions, un brin trop courtes, de Carmen Miranda. Bien qu’il ne s’agisse que de son second film américain, la chanteuse brésilienne crève l’écran dans ses trois numéros. Les compositions de Mack Gordon et Harry Warren lui permettent de montrer toute la fantaisie dont elle est capable dès lors qu’elle se trouve sur une scène. À la découvrir si charismatique dans That night in Rio (au point de voler la vedette à ses prestigieux partenaires), on se dit qu’il n’y a rien d’étonnant à ce qu’elle ait tourné ensuite une dizaine d’autres films à Hollywood.
L’histoire : Le chanteur américain Larry Martin (Don Ameche) et sa fiancée brésilienne Carmen (Carmen Miranda) sont les vedettes d’un cabaret de Rio. Tandis que Carmen interprète des morceaux hauts en couleurs, Larry a mis au point un numéro dans lequel il imite le baron Manuel Duane, connu pour ses nombreuses conquêtes féminines. La ressemblance entre les deux hommes est si frappante que Cecilia (Alice Faye), l’épouse du baron, ne tarde pas à tomber sous le charme du chanteur…

Bis repetita
Darryl Zanuck, le patron de la Twentieth Century Fox, décide en 1940 de mettre en chantier un remake de Folies-Bergères de Paris, une comédie musicale dans laquelle il avait réuni cinq ans plus tôt Maurice Chevalier et Merle Oberon. Le film était inspiré de la pièce The Red Cat, dont l’intrigue, pleine de marivaudages, s’était vue transposer à Paris. Cette fois, Zanuck , souhaite un cadre plus exotique encore : c’est à Rio que les scénaristes vont situer le chassé-croisé amoureux des personnages. Un chassé-croisé qui inquiète beaucoup les représentants du Code Hays : à leur demande expresse, le script ne doit en aucun cas laisser croire que la baronne Cecilia a « dormi » avec celui qui se fait passer temporairement pour son mari. Les auteurs s’exécuteront tant bien que mal, au risque de rendre certains passages peu crédibles… En revanche, l’ambassadeur du Brésil, consulté lui aussi, ne trouve rien à redire au scénario, affirmant même que le projet est de ceux qui peuvent amener de meilleures relations entre son pays et les États-Unis.

Fougue latine
Darryl Zanuck envisage d’abord de confier le rôle de Cecilia à des stars comme Rosalind Russell, Paulette Goddard ou Joan Bennett. Mais il choisit finalement celle qui est depuis longtemps la grande vedette des comédies musicales du studio, Alice Faye. Celle-ci retrouve alors pour la sixième fois Don Ameche, engagé pour tenir le double rôle de Larry et du baron Manuel (That night in Rio sera leur dernier film en commun). Le duo vedette se voit épaulé par ailleurs par Carmen Miranda, qui a fait l’année précédente ses débuts à Hollywood dans une autre comédie musicale de la Fox, Down Argentine way. Les deux actrices sont aussi différentes que l’exige le scénario, même si le personnage de Carmen Miranda reste assez mince : outre quelques scènes de jalousie chargées d’exprimer sa fougue latine, le rôle de celle que l’on surnomme déjà « la bombe brésilienne » consiste surtout en numéros musicaux débridés.

Boa Noite
Bien qu’elles s’inspirent pour la plupart de rythmes brésiliens, les chansons de That night in Rio sont écrites par un tandem tout ce qu’il y a de plus américain : Harry Warren et Mack Gordon, deux figures bien connues de la comédie musicale hollywoodienne, qui écrivent des morceaux sur mesure pour les vedettes du film. Les titres Chica Chiee Boom Chic, Cae Cae et I Yi, Yi, Yi, Yi (I Like You Very Much) mettent parfaitement en valeur l’exubérance de Carmen Miranda, tandis que Don Ameche et Alice Faye explorent un registre plus romantique avec Boa Noite et They Met in Rio. Les deux comédiens ont également enregistré une version moins endiablée de Chica Chica Boom Chic, mais celle-ci n’apparaîtra pas dans la version finale du film, qui sort sur les écrans le 11 avril 1941. Le succès étant au rendez-vous, la Fox livrera dix ans plus tard une troisième adaptation de la pièce The Red Cat, interprétée celle fois par Danny Kaye, Gene Tierney et Corinne Calvet, et intitulée On the Riviera de Walter Lang en 1951.

Programme musical (sélection)

CARMEN MIRANDA
Sambas endiablées, humour et fruits exotiques, Carmen Miranda, la « bombe brésilienne », incarne toute la séduction de l’Amérique latine. Il n’en faudra pas plus pour électriser le public américain des années 1940.

THE GANG’S ALL HERE (Banana split) – Busby Berkeley (1943)
Réalisée avec son panache habituel par Busby Berkeley, cette œuvre en Technicolor réunit la fine fleur de la comédie musicale « made in Fox ». Genèse d’une œuvre culte.
Fiche technique du film
Catégories :La Comédie musicale