Les Actrices et Acteurs

JEAN GABIN : RENCONTRES AVEC DELANNOY

Avec six films tournés en commun, Jean Gabin et Jean Delannoy ont connu durant deux décennies une amitié professionnelle qui a donné naissance à des classiques tels que les Maigret ou Le Baron de l’écluse, mais aussi à des œuvres plus inattendues…

Jean Gabin et Jean Delannoy (sur le tournage de Maigret tend un piège, 1958)

On pourrait s’étonner que la première rencontre cinématographique de Gabin et Jean Delannoy n’ait lieu qu’assez tardivement. Mais le cinéaste a entamé sa carrière au début des années 1940, à une époque où l’acteur avait gagné Hollywood. Et dans l’immédiat après-guerre, Gabin connaît une relative traversée du désert, tandis que Delannoy entame au contraire une ascension triomphale : alors que son adaptation de L’éternel retour, de Cocteau, lui a déjà valu un grand succès, le réalisateur décroche en 1946 la Palme d’Or à Cannes pour La Symphonie pastorale, film qui vaut également à Michèle Morgan un Prix d’interprétation. Une consécration qui se voit encore renforcée en 1950 par le Prix international du Festival de Venise pour Dieu a besoin des hommes. C’est dire que Delannoy s’avère alors le réalisateur le plus en vue du moment . Mais peu à peu, notamment grâce à La Marie du port de Carné, Gabin commence à reconquérir son statut d’avant-guerre : lui aussi se voit d’ailleurs récompensé à Venise en 1951, pour La Nuit est mon royaume. L’heure est donc venue pour les deux hommes de faire connaissance.

L’occasion leur en est fournie en 1952 par La Minute de vérité. C’est Michèle Morgan qui doit en être la vedette féminine : après La Symphonie pastorale, l’actrice et le cinéaste se sont déjà retrouvés en 1948 pour Aux yeux du souvenir. Pour Delannoy, il est tentant de réunir le couple mythique de Quai des brumes et de Remorques, dont le public connaît en outre l’idylle d’avant-guerre. Reste à savoir si Gabin acceptera d’interpréter un médecin dont la femme le trompe avec un jeune peintre. Mais, prenant le risque qu’un tel rôle entame son fameux « mythe » ; l’acteur se lance dans l’aventure. Sur le plateau, Gabin et Delannoy s’apprécient, chacun découvrant en l’autre un vrai professionnel. Aussi se retrouvent-ils en 1955, peu après le triomphe personnel connu par le comédien avec Touchez pas au grisbi : changeant radicalement de registre, le tandem se lance dans le projet de Chiens perdus sans collier, qui leur permet d’explorer une veine plus réaliste.

Mais c’est un polar dans la plus pure tradition du genre qui leur vaudra leur plus grand succès commun : en 1958, Gabin endosse dans Maigret tend un piège la panoplie du célèbre commissaire. Le film connaît un tel triomphe que les producteurs convaincront l’acteur et le cinéaste, pourtant réticents, d’en livrer une suite dès l’année suivante. Ce sera Maigret et l’affaire Saint-Fiacre, avant que Gabin n’incarne une troisième fois le héros de Simenon dans Maigret voit rouge – mais cette fois devant la caméra de Gilles Grangier. L’acteur retrouve en revanche Delannoy pour une comédie, Le Baron de l’écluse : dans ses mémoires, le cinéaste racontera avec humour la manière dont Gabin, lors du tournage, a d’abord refusé de porter le monocle, avant de l’adopter au point de ne plus vouloir le quitter ! Un récit qui révèle la complicité qui liait les deux hommes, après cinq films tournés ensemble. Delannoy avouera d’ailleurs s’être appuyé sur ce qu’il connaissait de la vie personnelle de Gabin pour le diriger dans leur sixième et dernier film, Le Soleil des voyous, polar où l’acteur joue un ancien truand ravi de rompre avec la tranquillité bourgeoise de sa nouvelle vie… [Collection Gabin – La Marie du port – Stéphane Brisset (n°21 – 2006)]


Jean Gabin, Jean Delannoy et Michèle Morgan. AFP Photo France-Cinéma-Delannoy

JEAN GABIN
S’il est un acteur dont le nom est à jamais associé au cinéma de l’entre-deux-guerres, aux chefs-d’œuvre du réalisme poétique, c’est bien Jean Gabin. Après la guerre, il connait tout d’abord une période creuse en termes de succès, puis, à partir de 1954, il devient un « pacha » incarnant la plupart du temps des rôles de truands ou de policiers, toujours avec la même droiture jusqu’à la fin des années 1970.


CHIENS PERDUS SANS COLLIER – Jean Delannoy (1955)
Chiens perdus sans collier fait partie d’une catégorie un peu à part dans la filmographie de Gabin, mais néanmoins importante : celle puisant dans un certain réalisme social. L’expression est à prendre au sens large, Gabin n’ayant pas réellement participé à des films « militants ».


SIMENON AU CINÉMA (période : 1932-1980)
Plus encore que Balzac, Dumas, Zola ou Maupassant, c’est Georges Simenon qui est l’écrivain le plus adapté par le cinéma français. Il est un peu pour les metteurs en scène l’équivalent de ce que le roman noir de Chandler ou d’Hammett fut pour ceux de l’Amérique : l’occasion d’un coup de projecteur sur telle ou telle couche de la société, par le biais de l’enquête policière, voire du simple fait divers.


1 réponse »

  1. Ce qu’il faut savoir c’est que le rôle de Maigret ( tend un piège) était destiné à Daniel Gelin

    Celui ci s’est desiste en invoquant le fait qu’il était trop jeune pour le role

    Heureusement Mr Gabin a endossé le rôle du celebre commissaire qui selon Simenon est le meilleur interprète de son personnage

    Bien sur Harry Baur fut magistral aussi

    En parlant de ce film que dire du formidable Jean Desailly qui fut grandiose ainsi que de la jeune Ànnie Girardot

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