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CYD CHARISSE

Avare de compliments pour Ginger Rogers, Fred Astaire idolâtrait Cyd Charisse, qui partageait sa technique éblouissante et son élégance suprême. Quelques pas et une jupe fendue lui suffisaient pour créer une image obsédante de femme fatale. Il serait injuste de dire qu’elle n’était pas bonne actrice, mais une partie de sa magie semblait s’évanouir lorsque la musique s’arrêtait, peut-être parce que personne ne croyait à elle autrement qu’en danseuse aux longues jambes et aux déhanchements souverains. Pourtant, Nicholas Ray et Vincente Minnelli redécouvrirent tardivement des qualités dramatiques qu’elle avait laissé entrevoir dans quelques films de jeunesse.

WORDS AND MUSIC (Ma vie est une chanson) – Norman Taurog (1948)

En 1918, à l’université de Columbia, Richard Rodgers et Lorenz Hart, deux étudiants rêveurs, enthousiastes et passionnés de musique font connaissance. Ils s’associent pour écrire des spectacles musicaux joués par les étudiants, Rodgers écrivant les notes et Hart les paroles des chansons. Leurs productions font tant parler d’elles que, l’année suivante, ils parviennent à placer l’une de leurs chansons, Any Old Place With You, dans un spectacle de Broadway. Le morceau obtient un gros succès commercial à la suite duquel, pendant deux décennies, les deux hommes vont régner sur Broadway et écrire des dizaines de classiques de la musique populaire américaine… Film de prestige réunissant des plus grandes vedettes de la MGM, cette biographie musicale retrace de manière fort libre le compagnonnage de Richard Rodgers et Lorenz Hart.

ON THE TOWN (Un Jour à New York) – Stanley Donen et Gene Kelly (1949)

En 1949, le producteur Arthur Freed décide de donner leur chance à deux chorégraphes, Gene Kelly et Stanley Donen, pour réaliser un film moderne et stylisé. Si le premier est déjà un artiste confirmé, le second n’a pas vingt-cinq ans quand le tournage commence. C’est sûrement sa jeunesse, alliée à la nouveauté du propos, qui permet au tandem de sortir des sentiers battus pour innover. Les chansons se fondent dans une action réaliste, elles expriment les sentiments des personnages, et peuvent aussi les emmener dans des décors imaginaires… Autant d’extravagances pour l’époque, et qui font encore mouche aujourd’hui. Grâce à la musique de Leonard Bernstein et Roger Edens, et aux paroles d’un duo plein d’avenir, Adolph Green et Betty Comden, le film nous emporte d’un bout à l’autre de New York à un rythme endiablé. Du Musée d’Histoire Naturelle, avec son squelette de dinosaure, à l’Empire State Building, de la Statue de la Liberté à Chinatown, le public du monde entier découvre dans le film le vrai visage de Big Apple. Avec, pour guides, trois matelots en permission qui n’ont que 24 heures pour découvrir Manhattan, et l’amour. Laissez-les donc vous embarquer vous aussi pour tout « Un jour à New York ».

LES MUSICALS DE LA MGM

L’âge d’or de la comédie musicale hollywoodienne, celle qui réussit l’accord parfait entre action, musique et danse, est à jamais lié à un sigle : MGM et à un nom : Arthur Freed, le grand promoteur du genre. « Nous comptons plus d’étoiles que le ciel», telle était l’orgueilleuse devise de la MGM, et si l’on considère le nombre de vedettes – de Greta Garbo à Mickey Rooney – que la firme avait sous contrat à la fin des années 30, on peut dire qu’elle était à peine exagérée. Pourtant, la MGM ne sut pas toujours tirer le meilleur parti de son exceptionnelle « écurie ».

ZIEGFELD FOLLIES – Vincente Minnelli (1945)

Dans un paradis de coton et de marbre, Florenz Ziegfeld se remémore ses souvenirs terrestres. Il fut un très célèbre directeur de revue à Broadway. Un à un, ses numéros défilent dans sa mémoire. Ne vous laissez pas effrayer par les automates mal dégrossis qui ouvrent le film. Dans un Broadway cartonné façon école maternelle, Vincente Minnelli commence par évoquer la pré-histoire de la comédie musicale, avec toute sa mièvrerie archaïque. Au fil du temps, il nous laisse contempler l’éclosion de ce genre féerique, pour accéder à l’apothéose, avec des numéros étincelants, peut-être parmi les plus beaux que Hollywood nous ait offerts. A la manière d’un reportage foutraque et raffiné, il laisse les étoiles du genre (Fred Astaire, Judy Garland…) jouer leur propre rôle, et se gausse des futures hagiographies documentaires que la télévision leur consacrera. Une fantaisie brillante et prémonitoire qui nécessiterait peut-être un petit remontage : l’humour de certains sketchs non musicaux a mal vieilli, mais la folie brûlante des autres compense largement ces faiblesses. Allez, s’il fallait n’en garder que deux, ce serait sans aucun doute la lévitation éthylique de Cyd Charisse, blottie dans un nuage de bulles de champagne, et le frissonnant Love, que Lena Horne psalmodie comme une formule hypnotique… [Télérama – Marine Landrot]

LES GIRLS – George Cukor (1957)

Procès retentissant : lady Sybil Wren, ancienne girl de la troupe du célèbre danseur Barry Nichols, est poursuivie pour diffamation par une autre ex-girl, Angèle Ducros, à cause de son livre de souvenirs sur l’époque où, avec Joy, une troisième girl, elles étaient les vedettes du spectacle de Nichols à Paris. Les Girls peut se vanter d’avoir le scénario le plus sophistiqué de l’histoire de la comédie musicale : un Rashomon dans le milieu stylisé (comme les aime Cukor) du music-hall parisien des années 1950. Délicieusement immoral, il passe en revue trois petites arrivistes amoureuses de leur chorégraphe (forcément, c’est Gene Kelly), qui cherchent à épouser des hommes riches. Comme toujours chez Cukor, il n’y a qu’un pas (ici, un pas chassé) entre comédie et drame, entre illusion et réalité. « Où est la vérité ? », demande un panneau brandi devant le tribunal. Dans la synthèse de tous les mensonges de ces dames… Avec son casting brillant (mention spéciale à Kay Kendall en girl alcoolique), ses chansons de Cole Porter et sa chorégraphie de Jack Cole, Les Girls brille des derniers feux de la comédie musicale de l’âge d’or et offre à Gene Kelly son dernier grand rôle hollywoodien. Il chorégraphia lui-même un ballet hommage à The Wild One (L’Equipée sauvage), avec Marlon Brando, d’une beauté à tomber. [Guillemette Odicino – Télérama]

COVER GIRL (La reine de Broadway) – Charles Vidor (1944)

Pour un historien de cinéma, l’un des éléments les plus marquants de Cover girl est assurément le conflit de générations qui a marqué son tournage en 1943, même si cet affrontement n’a peut-être pas été perçu comme tel à l’époque. Une grande partie de l’équipe est en effet composée de vétérans du cinéma, qu’il s’agisse du réalisateur Charles Vidor, du chef opérateur Rudolph Maté, du compositeur Jerome Kern ou du parolier Ira Gerswhin. Quant aux chorégraphes Seymour Felix et Val Raset, ils sont nés respectivement en 1892 et 1900. Le décalage est donc grand entre leurs goûts et ceux de deux nouveaux venus : Gene Kelly, âgé de trente-et-un ans au moment du tournage, et Stanley Donen, qui n’en a même pas vingt.
Si les numéros mis au point par Felix et Raser s’inscrivent dans une double tradition – celle des revues de Broadway (The Show Must Go On, Sure Thing… ) et des films musicaux de Busby Berkeley (Cover Girl) – les séquences chorégraphiées par Kelly et Donen font preuve d’une grande modernité, en faisant notamment descendre le personnages de leur piédestal pour danser dans la rue. On sait que ce style « révolutionnaire », ébauché dans Cover Girl, fera plus tard le succès de films comme On the town (Un jour à New York) et Singin’ in the rain (Chantons sous La pluie)…

BRIGADOON – Vincente Minnelli (1954)

En 1954, Gene Kelly retrouve le réalisateur d’Un Américain à Paris pour une fable musicale pleine de bruyères et de cornemuses. 
On a parfois dit que Brigadoon était la plus européenne des comédies musicales américaines. Inspirée d’un conte allemand et transposée en Écosse, son intrigue joue sur la nostalgie de la Vieille Europe, cette terre qu’ont quittée tant d’immigrants devenus citoyens des États-Unis.

AN AMERICAN IN PARIS – Vincente Minnelli (1951)

Couvert d’oscars et de récompenses de toutes sortes, généralement porté aux nues, considéré souvent comme le plus grand « musical » de l’histoire du cinéma, Un Américain à Paris est le film qui a le plus contribué à la célébrité de Vincente Minnelli. Quand on parle de lui aux profanes, on peut se contenter de dire : c’est l’auteur de Un Américain à Paris. That’s Entertainment, laborieux film de montage, se termine, en apothéose, par son célébrissime ballet final. Un livre entier (The Magic Factory : How MGM Made An American in Paris), a été consacré au tournage. Tous les collaborateurs du film en parlent avec des sanglots dans la voix. Et pourtant, nous restons sur une étrange impression de réserve, car il s’agit d’un des films les plus inégaux de son auteur. Si le ballet final, maintes fois célébré, n’a rien perdu de son éclat, il  faut pourtant nuancer sur le reste et si, finalement, Un Américain à Paris était un des films les moins personnels de Minnelli ? Si sa réputation était, en partie du moins, usurpée ?

THE PIRATE – Vincente Minnelli (1948)

Avant-garde ! A l’issue d’une projection de travail organisée le 29 août 1947 à la MGM, Cole Porter fait part de ses craintes au producteur Arthur Freed : selon lui, The Pirate risque fort de dérouter le public. Et de fait, malgré son affiche prestigieuse, la sortie de cette comédie musicale atypique va constituer un désastre financier, les recettes atteignant à peine la moitié du budget initial… D’où vient que ce film, aujourd’hui culte, n’a pas séduit en 1948 ? Il est certain que la manière dont The Pirate flirte sans cesse avec le second degré a de quoi surprendre à l’époque.

SUMMER STOCK (La Jolie fermière)– Charles Walters (1950)

Dernière comédie musicale de Judy Garland à la MGM, Summer stock (La Jolie fermière) séduit aujourd’hui encore par sa fraîcheur. Certes, le film souffre un peu d’un scénario relativement prévisible, et de seconds rôles aussi envahissants que décalés par rapport à ses deux grandes stars. Mais il y a, justement, ces deux grandes stars, réunies à l’écran pour la troisième et dernière fois…