Étiquette : serge reggiani

LE DOULOS – Jean-Pierre Melville (1962)

Un cinéma policier des plus inhabituels ! L’affaire est ténébreuse. Mais peut-elle ne pas l’être ? Un tel « héros » ne laisse jamais deviner, par principe, ses intentions profondes. On ne peut pas tracer une frontière précise entre sa franchise et sa duplicité. Nous sommes dans la pénombre des consciences ambiguës. L’incertitude perpétuelle qu’inspire le doulos crée fatalement un climat d’angoisse. Que l’on interprète mal tel ou tel geste, qu’une fausse pensée chemine, et nous frôlons aussitôt la tragédie. Là réside le véritable intérêt du film. Le narrateur piste la vérité psychologique d’un être à travers une intrigue dont chaque rebondissement aiguise notre curiosité. [Louis Chauvet]

LA RONDE – Max Ophüls (1950)

L’interminable travelling qui ouvre le film permet au narrateur de traverser une scène de théâtre, un studio de cinéma, de s’habiller en costume 1900, de faire s’animer un manège sur lequel apparaît la fille des rues. Celle-ci rencontre un soldat, qui courtise une femme de chambre, et la ronde va tourner ainsi jusqu’à ce qu’un comte très snob retrouve la fille des rues… Les mouvements de caméra étincelants, l’ironie et le brio de la mise en scène dissimulent mal la gravité de la pièce de Schnitzler. Tous les héros semblent, dans leur course frénétique vers le plaisir, lutter contre le temps. Jean-Louis Barrault surjoue, et on eût préféré Marlene Dietrich, initialement prévue, à Isa Miranda. Mais tout le reste est sublime. Notamment le moment où Daniel Gélin et Danielle Darrieux discutent de l’impuissance masculine à propos de De l’amour, de Stendhal… [Pierre Murat – Télérama]

MARIE-OCTOBRE – Julien Duvivier (1959)

Un grand film de la fin des « années 50 », signé Julien Duvivier et Henri Jeanson. Un véritable suspens, magistralement interprété par une pléiade de comédiens prestigieux. En 1944, ils formaient un réseau de Résistance. L’un deux a trahi. Des années plus tard « Marie-Octobre », seule femme du groupe, les réunit pour découvrir qui a trahi… Et, à la fin de l’enquête, le traître devra mourir !

CASQUE D’OR – Jacques Becker (1952)

La place particulière qu’occupe Casque d’or dans l’œuvre de Becker tient au fait qu’il synthétise à la fois les acquis de cette période libératoire de sa filmographie, tout en réintroduisant certaines caractéristiques du cinéma classique. Le choix de réaliser un film qui se déroule à la Belle Époque est un des premiers signes de ce rapprochement avec le classicisme cinématographique de l’après-guerre, très friand de ces époques passées, et qui différencie assez nettement Casque d’or des comédies contemporaines que Becker tourne depuis 1946.

MANON – Henri-Georges Clouzot (1949)

Voilà une modernisation réussie (à l’inverse de celle de Jean Aurel, quelques années plus tard) du roman de l’abbé Prévost. On est en 1944, en plein marché noir. Desgrieux est un jeune FFI et Manon, qui aime le luxe, fréquente les maisons closes. On retrouve la noirceur de Clouzot, sa fascination-répulsion pour Manon, petit animal doué pour le plaisir. Cécile Aubry, qu’il giflera beaucoup sur le tournage, est le double de Bardot dans La Vérité, qu’il giflera aussi, mais qui, elle, lui rendra coup pour coup. La scène dans le désert, où Michel Auclair traîne sur son épaule une Manon agonisante, est caractéristique du cinéma de l’auteur. Et de l’époque.

RETOUR A LA VIE – Cayatte, Lampin, Clouzot, Dréville (1949)

Le Retour à la vie est un film noir dont l’initiative revient au producteur Jacques Roitfeld, à qui l’on doit notamment Copie Conforme de Jean Dréville avec Louis Jouvet. Marqué par le retour à la liberté de milliers de soldats et de déportés entre 1944 et 1945, Jacques Roitfeld a été sensible au douloureux problème de leur réinsertion dans la vie civile par l’extrême difficulté de la reprise d’une activité normale.