Histoire du cinéma

Autour de Pépé le Moko : RÊVES D’EXOTISME

Légionnaires, explorateurs et aventuriers en tous genres ont longtemps peuplé les écrans, dans des films ayant pour cadre les contrées les plus lointaines. De Pépé le Moko à Lawrence d’Arabie, retour sur une mode qui transporta littéralement les foules. 

Très tôt, le cinéma a rêvé d’horizons lointains. À la suite des opérateurs Lumière, lancés dès 1897 dans la chasse aux vues « pittoresques », certains réalisateurs partent aux quatre coins du monde pour en rapporter des images jusque-là inconnues. En 1922, Robert Flaherty signe ainsi avec Nanouk l’Esquimau le premier grand documentaire du septième art (il cosignera ensuite avec Murnau le magnifique Tabou). De son côté, Léon Poirier retrace dans La Croisière noire la célèbre expédition Citroën en Afrique. Mais la fiction n’est pas en reste : dès 1921, Jacques Feyder crée l’événement en tournant L’Atlantide non pas en studio, mais dans le Sahara. Le film remporte un énorme succès, et le public va s’avérer désormais friand de contrées mystérieuses – un goût encore accentué par l’Exposition coloniale de Paris en 1931. Cette année-là, Maurice Tourneur réalise Partir, film dont le héros criminel s’embarque pour l’Indochine. Sur un thème similaire, La Bandera fera de Gabin l’archétype de l’aventurier romantique – une image confortée par Pépé le Moko. Et cette veine « exotique» du cinéma français se verra également illustrée par des films comme Macao l’enfer du jeu de Jean Delannoy ou, dans un style plus réaliste, Le Fleuve de Jean Renoir… [Collection Gabin – Eric Quéméré – janvier 2006]

De Shanghai à Casablanca

De l’autre côté de l’Atlantique, les cinéastes d’Hollywood se laissent gagner eux aussi par cette « fièvre tropicale », Josef von Sternberg en devient même le champion, signant dès 1930 le sulfureux Morocco, où Marlène Dietrich se consume pour le légionnaire Gary Cooper. Dans Shanghai Express, le réalisateur plonge ensuite son actrice fétiche dans la guerre civile chinoise, avant de livrer en 1941 une nouvelle vision de la mégapole asiatique dans Shanghai, interprété cette fois par Gene Tierney. Mais Sternberg n’a évidemment pas l’exclusivité d’un genre auquel se frottent de nombreux cinéastes – notamment Frank Capra, qui réalise en 1937 le lyrique Horizons perdus. Car depuis le triomphe au début des années 30 de Tarzan l’homme-singe et de King Kong, le public américain réclame lui aussi de pouvoir « s’évader ». Influencé par les films de Gabin, qui ont connu une sortie remarquée aux États-Unis, William Wellman fait à nouveau de Gary Cooper un légionnaire dans Beau geste, avant que Michael Curtiz ne situe l’intrigue de son chef-d’œuvre Casablanca dans la cité marocaine, alors sous domination française. [Collection Gabin – Eric Quéméré – janvier 2006]

Dernière séance

Mais le « temps des colonies » va bientôt prendre fin : en 1947, l’Inde proclame son indépendance, devenant un modèle pour les pays d’Afrique et d’Asie. Le cinéma rendra évidemment compte de cette rupture. D’une manière parfois militante, comme ce sera le cas avec les films de René Vautier (Afrique 50 lui vaut d’être emprisonné, et Avoir 20 ans dans les Aurès sera également censuré) ou d’Yves Boisset (RAS). Mais même au sein du cinéma de divertissement, la représentation des pays d’outremer va singulièrement changer : si un film comme Lawrence d’Arabie puise encore largement dans la tradition d’avant-guerre, Joseph Mankiewicz et Nicolas Ray donneront, dans Un Américain bien tranquille et Les 55 jours de Pékin, une vision moins angélique de la présence occidentale en Asie. Ce qui n’empêchera pas des films d’aventures plus tardifs comme Fort Saganne, Out of Africa ou Indochine de perpétuer à leur manière le romanesque hérité de Pépé le Moko[Collection Gabin – Eric Quéméré – janvier 2006]

A voir également…

PÉPÉ LE MOKO de Julien Duvivier (1936-37) avec Jean Gabin, Mireille Balin, Line Lors, Lucas Gridoux, Fernand Charpin, Marcel Dalio,Fréhel…

LA BANDERA de Julien Duvivier (1935) avec Jean Gabin, Annabella, Robert Le Vigan, Raymond Aimos, Viviane Romance et Pierre Renoir

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PÉPÉ LE MOKO – Julien Duvivier (1937) avec Jean Gabin, Mireille Balin, Line Lors, Lucas Gridoux, Fernand Charpin, Marcel Dalio,Fréhel…

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