Tourné pendant l’été 1950, le second film de Stanley Donen est avant tout un écrin pour le talent extraordinaire de Fred Astaire, parfaitement secondé ici par la charmante Jane Powell. Amoureux sur scène, Tom et Ellen Bowen sont frère et soeur à la ville. Leur nouveau spectacle de Broadway remporte un tel succès qu’on leur propose bientôt de le présenter à Londres. Tous deux sont évidemment emballés à cette idée, même si cela implique pour Ellen de laisser à New York ses chevaliers servants. Les artistes s’embarquent donc pour l’Angleterre, où se prépare fébrilement le mariage de la jeune princesse Elizabeth…

Certains génériques semblent dérouler le « Who’s who » de la comédie musicale. C’est le cas de Royal Wedding (Mariage royal), qui n’a pas seulement pour vedettes Fred Astaire et Jane Powell, mais bénéficie en outre du prestige de Stanley Donen, réalisateur de On the Town (Un Jour à New York) et de Singin’in the rain (Chantons sous la pluie) et d’Alan Jay Lerner, scénariste multi-oscarisé. Sans oublier le décorateur Cedric Gibbons et le producteur Arthur Freed, deux noms indissociables de l’âge d’or de la MGM.. Toutes ces bonnes fées se sont penchées sur le berceau de Royal Wedding, film qui n’égale sans doute pas d’autres chefs-d’œuvre signés par ces artistes, mais qui comporte certains des meilleurs numéros musicaux tournés à Hollywood. À commencer évidemment par celui qui suffit encore aujourd’hui à évoquer toute la magie de Fred Astaire, seul acteur capable de danser au plafond… Sorti en mars 1951, Royal Wedding est également important car il s’agit du premier film réalisé en solo par StanleyDonen, sans son complice Gene Kelly. Ce nouveau jalon permettra au cinéaste de poursuivre une carrière qui fera de lui l’un des grands spécialistes de la comédie musicale, avant de s’ouvrir tout aussi brillamment à d’autres genres.

Cherchant à faire écrire un film sur mesure pour Fred Astaire, le producteur Arthur Freed se tourne en 1950 vers Alan Jay Lerner, célèbre parolier de Broadway qui n’a encore jamais travaillé pour le cinéma. En quête d’un sujet, Lerner décide de s’inspirer tout simplement de la vie de Fred Astaire, qui a connu ses premiers succès en dansant avec sa sœur Adele, avant qu’elle ne le quitte pour épouser un lord. De même, Lerner trouve amusant de situer l’histoire à Londres, au moment même du mariage de la future Elizabeth II avec le prince Philippe, qui a eu lieu en novembre 1947. Ces éléments authentiques forment alors le point de départ d’une intrigue qui, pour le reste, relèvera de la fiction. Une fiction d’ailleurs assez classique – surtout si on la compare à l’histoire du tournage lui-même, qui commence en juillet 1950 sous la direction de Charles Walters, grand spécialiste de la comédie musicale…

La vedette choisie pour jouer face à Fred Astaire est June Allyson, rendue célèbre par Les Trois Mousquetaires. L’actrice semble parfaite dans le rôle, à un détail près : elle se révèle bientôt enceinte. Il lui faut donc une remplaçante, et Freed choisit de confier le rôle à Judy Garland. Mais Walters, qui garde un souvenir atroce de sa précédente collaboration avec elle, abandonne le film… Le jeune Stanley Donen, qui vient de cosigner avec Gene Kelly On the Town, le remplace donc. Le tournage reprend tant bien que mal, mais les caprices de Judy Garland finissent par exaspérer le studio, qui la renvoie ! À en croire la légende, l’actrice tente alors de mettre fin à ses jours dans un accès de désespoir. Avant de se venger en chantant à la radio une des meilleures chansons du film, How could yeu believe me, en duo avec Bing Crosby… Le rôle d’Ellen étant à nouveau vacant, Freed engage finalement Jane Powell qui, elle, aura la bonne idée d’arriver à l’heure au studio, et d’attendre la fin du tournage pour se découvrir enceinte.

Le morceau le plus célèbre de Royal Wedding est un numéro d’Astaire seul qu’il effectue en pensant à la femme qu’il aime et en dansant comme par miracle sur les murs et le plafond de sa chambre d’hôtel. «C’était, avouait Fred Astaire, un numéro peu ordinaire. Beaucoup de gens n’ont pas compris comment on avait pu le réaliser. La pièce entière avait été retournée, et bien sûr j’étais tout le temps sur le plancher. La pièce paraissait différente, vue sens dessus dessous. La caméra, le chef opérateur et la pièce tournent, moi je grimpe. Tout le monde m’a demandé : « Est-ce que la caméra était à l’envers ? » Non, tout le monde évoluait dans le sens inverse ; mais c’est difficile à expliquer. Nous avons tourné en une seule prise. Pas de chutes, pas de plans truqués. Lorsque le plateau tournait, on aurait réellement dit que je grimpais sur les murs. La première fois qu’on a fait tourner la pièce, tout est tombé à terre : les photos sur les murs, les livres, un univers en folie. Nous avons dû tout récupérer à toute allure, car la pièce devait garder une apparence normale… Le numéro, dansé sur la musique « You’re all the World to Me », était photographié dans une pièce construite par Bethlehem Steel. La caméra et les chefs opérateurs pivotaient de trois cent soixante degrés ; l’éclairage du plateau également. Cela nécessitait un grand transformateur. L’équipe technique a si vite appris à le maîtriser que Stanley Donen a pu filmer la séquence en une demi-journée. »


LA COMÉDIE MUSICALE
La comédie musicale a été longtemps l’un des genres privilégiés de la production hollywoodienne, et probablement le plus fascinant . Né dans les années 1930, en même temps que le cinéma parlant, elle témoigna à sa manière, en chansons, en claquettes et en paillettes, de la rénovation sociale et économique de l’Amérique. Mais c’est dix plus tard, à la Metro-Goldwyn-Mayer, que sous l’impulsion d’Arthur Freed la comédie musicale connut son véritable âge d’or, grâce à la rencontre de créateurs d’exception (Vincente Minnelli, Stanley Donen) et d’acteurs inoubliables (Fred Astaire, Gene Kelly, Judy Garland, Cyd Charisse, Debbie Reynolds). Par l’évocation de ces années éblouissantes à travers les films présentés, cette page permet de retrouver toute la magie et le glamour de la comédie musicale.



L’histoire :
Tom Bowen (Fred Astaire) et sa sœur Ellen (Jane Powell), célèbres danseurs américains, partent pour se produire à Londres. La capitale britannique s’apprête à célébrer le mariage de la princesse Elizabeth et du prince Philip. Ellen dit au revoir à ses nombreux soupirants et fait la connaissance à bord du navire de Lord John Brindale (Peter Lawford) qui est visiblement séduit par elle. A Londres, Tom rencontre dans la rue Anne Ashmond (Sarah Churchill) qui est danseuse et qu’il fait engager dans son futur spectacle. Celui-ci est un succès et Tom apprend avec plaisir que le fiancé d’Anne ne l’a pas attendue pour se marier. Le jour du mariage royal voit également la double union de Tom et d’Anne et d’Ellen et de John Brindale.
Programme musical (sélection)
Music by Burton Lane
Danced by Fred Astaire
Music by Burton Lane
Lyrics by Alan Jay Lerner
Sung and Danced by Jane Powell and Fred Astaire
Music by Burton Lane
Lyrics by Alan Jay Lerner
from « I Want to Be a Minstrel Man » in Kid Millions (1934)
Sung and Danced (on walls and ceiling) by Fred Astaire
Music by Burton Lane
Lyrics by Alan Jay Lerner
Sung by Fred Astaire
Danced by Fred Astaire, Jane Powell and Chorus

FRED ASTAIRE
La longue carrière de Fred Astaire est désormais entrée dans la légende ; son exceptionnel génie de danseur ne l’a toutefois pas empêché d’être aussi un excellent acteur.







JANE POWELL
Aux antipodes de la vamp hollywoodienne, l’actrice a promené son joli minois dans certaines des meilleures comédies musicales d’Hollywood, avant de trouver un second souffle sur les planches.
Née le 1 avril 1929 à Portland, Suzanne Lorraine Burce grandit en rêvant devant les films de Jeanette MacDonald. Poussée par ses parents, elle chante dès son plus jeune âge, et devient à douze ans « The Oregon Victory Girl ». Nous sommes en 1941, son joli visage et sa voix de soprano vont soutenir l’effort de guerre, sur scène et à la radio. Devenue célèbre, elle est engagée par la MGM et se voit offrir le premier rôle d’une comédie musicale, Song of the Open Road. Son personnage se nommant Jane Powell, le studio décide de lui garder ce nom à la fin du tournage. Le film sort à New York le 6 juin 1944, le D-Day.
Jane enchaîne avec Délicieusement dangereuse et Cupidon mène la danse, film qui lui vaut de réaliser son rêve en tournant avec Jeanette MacDonald. Elle joue également dans Ainsi sont les femmes avec une autre enfant star, Liz Taylor, qui devient son amie. Mais Jane a beau être populaire (elle chante en 1949 pour l’investiture du président Truman), ses films sont sans grand relief. C’est pourquoi Fred Astaire ne sera guère enthousiaste à l’idée qu’elle joue dans Mariage Royal. Mais la performance de Jane lui donne tort, et Stanley Donen, ravi de leur collaboration, la réclame ensuite pour Les Sept Femmes de Barbe-Rousse, où l’actrice fait merveille. Elle retrouvera le cinéaste pour un petit rôle dans Au fond de mon cœur, mais le «musical » hollywoodien décline à la fin des années 1950, et les films intéressants sont rares.
Jane part alors pour la côte Est, où elle va connaître une seconde carrière sur scène, notamment dans Les Sept Femmes de Barbe-Rousse. En 1964, elle n’hésite pas à monter la revue Juste 20 plus moi, où elle est entourée de vingt beaux «chorus boys ». Elle joue aussi un one-woman show dont le titre, La Fille d’à côté et comment elle a grandi, fait référence à son physique de « bonne copine ». Toujours alerte, Jane apparaît en 2002 dans la série New York – Unité spéciale, puis dans le spectacle Bounce, de Stephen Sondheim. Mariée depuis vingt ans à l’ancien acteur Dickie Moore (célèbre pour avoir été le premier à embrasser à l’écran Shirley Temple), elle se partage aujourd’hui entre New York et leur maison du Connecticut.

- LIFEBOAT – Alfred Hitchcock (1944)
- I DIED A THOUSAND TIMES (La Peur au ventre) – Stuart Heisler (1955)
- BARBARA STANWYCK
- ALL ABOUT EVE (Ève) – Joseph L. Mankiewicz (1950)
- [AUTOUR DE « L’IMPOSTEUR »] HOLLYWOOD S’EN VA-T-EN GUERRE
Catégories :La Comédie musicale