Histoire du cinéma

[la IVe République et ses films] LA QUALITÉ – CHACUN À SA PLACE (3/10)

Le cinéma, toujours fasciné par la grandeur du Grand Siècle, évoque Descartes, La Fontaine, Molière, Beaumarchais et Marivaux. Il admire également le panache romantique et la précision réaliste, tout en cherchant à remplacer la cadence des strophes et la vivacité du dialogue par des combinaisons d’images et de sons. Pendant l’occupation, le cinéma français, replié sur lui-même, s’épanouit en recréant un monde de rêve. Après la victoire alliée, il revient à la réalité, malgré la concurrence américaine. Les réalisateurs en vogue, tels que ClouzotGuitryCarné, Delannoy, Autant-LaraCayatteBecker, Clément, Allégret, Decoin, Christian-Jaque, Dréville, Daquin, Lacombe, Marc Allégret, René Clair et Julien Duvivier, travaillent avec ardeur pour affirmer la prépondérance de la France dans le cinéma mondial.


[la IVe République et ses films] LA QUALITÉ – LA MOISSON DE LA LIBÉRATION (1/10)
S’écoule l’année 1945. Le bilan de la Saint-Sylvestre surprend et inquiète. Abstraction faite des films inspirés par le conflit et l’occupation, les premiers préposés aux opérations de qualité se sont embourbés dans des histoires battues et rebattues…

[la IVe République et ses films] LA QUALITÉ – UNE ABDICATION FORCÉE (2/10)
Le triomphe des Enfants du paradis a marqué la carrière de Marcel Carné. Ce film, fruit de la collaboration entre Carné, Prévert, Trauner, Hubert, Thiriet et Kosma, est un pur produit de la qualité française, rendant hommage au théâtre et à la pantomime. Conscient de la difficulté de surpasser cette œuvre, Carné choisit comme prétexte un ballet, Le Rendez-vous, avec un scénario de Prévert et une musique de Kosma, bien accueilli. Prévert adapte le scénario pour Jean Gabin, de retour des États-Unis, et Marlène Dietrich, désireuse de tourner à ses côtés. L’action, concentrée en une nuit, se déroule dans un quartier appauvri et glacial de Paris, juste après la guerre.


La qualité, telle que la conçoivent et que la régentent quelques metteurs en scène, doit fuir les escarpements, oublier d’être acerbe, et répudier les sujets qui reflètent une actualité trop brûlante.

La Beauté du Diable (René Clair) – 1950

La bombe atomique aperçue dans un miroir surprend dans La Beauté du diable de René Clair (1949). Sous la signature du réalisateur, on attendait une fable légère ; pas ces aperçus d’apocalypse au détour d’un scénario touffu. René Clair se le tient pour dit, abandonne donc Hiroshima et retrouve avec délices les jolies marionnettes qui peuplent les rêves de Gérard Philipe (Les Belles-de-Nuit, 1952). Lorsqu’il tente de donner des accents humains aux personnages essentiels (Michèle Morgan dans Les Grandes Manœuvres, 1956, ou Pierre Brasseur dans Porte des Lilas, 1957), il persiste a les entourer de comparses aux effets mécaniques, d’une multitude de seconds rôles, efficaces mais encombrants et surtout sans surprises. Au demeurant, Clair va briguer un siège à l’Académie française où il sera élu en I960. Triomphe de la qualité.

Lorsque Clouzot barbouille de touches noires les minauderies de Miquette et sa Mère (1949), on lui reproche avec aigreur de s’égarer dans un domaine qui ne lui appartient pas. Lorsqu’il se moque de la farce des services secrets dans un film-canular, Les Espions (1958), il se fait tout aussi bien taper sur les doigts. Partis pour une soirée récréative, les spectateurs alléchés par le titre sont saisis à rebrousse-poil et moqués. Henri Jeanson rigole et classe le dossier : « Clouzot a fait Kafka dans sa culotte. » Où va-t-il culbuter ? Sa spécialité c’est le suspense. Qu’il s’y tienne. Les Diaboliques (1954) c’est de la belle ouvrage et la façon d’appâter le chaland en interdisant qu’on révèle le secret final, une trouvaille.

Et Le Salaire de la peur (1952) où souffle en trombe le vent de l’aventure. Voilà des scénarios, goupillés, pesés pour que le client trouve sa ration exacte d’effroi confortable. Scènes à effets, acteurs convaincants, décors éprouvés, extérieurs significatifs et acidité du style. Ces romans haletants et satisfaisants ne valent-ils pas mieux que Manon (1949), dont la dérision gêne. Toute vérité n’est pas bonne à dire, on le constate en feuilletant cet album d’images désagréables. Pourquoi revenir sur les excès de la Libération et délaisser les grâces de l’abbé Prévost ? Et puis cette conclusion dans les sables du désert moins brûlants que l’amour fou qui consume les amants ? Clouzot, hors de ses manies, trébuche et s’abat. Tout flamboiement lui est interdit.  [La IVe République et ses films – Raymond Chirat – 5 Continents / Hatier (1985)]


[la IVe République et ses films] LA QUALITÉ – DRAPEAUX NOIRS (4/10)
Les films d’Yves Allégret illustrent la tradition du réalisme poétique avec des ambiances sombres, des personnages marquants et un attachement au quotidien portuaire. En parallèle, Julien Duvivier maintient une vitalité dans le cinéma noir français, multipliant les succès populaires et maniant savamment les contrastes entre tragédie et légèreté, notamment à travers les séries Don Camillo et des œuvres comme Voici le temps des assassins. Si la constance et le réalisme caractérisent ses films, l’originalité semble s’être réfugiée dans La Fête à Henriette.


MIQUETTE ET SA MÈRE – Henri-Georges Clouzot (1950)
Henri-Georges Clouzot ne compte que quatre films à son actif, mais il fait déjà partie de l’élite des réalisateurs français. L’Assassin habite au 21 a été un grand succès public ; Le Corbeau bien que controversé  et Quai des orfèvres méritent le qualificatif de chefs-d’œuvre. Pour de nombreux exégètes de ClouzotMiquette et sa mère est considéré comme un passage à vide dans son œuvre.

LES DIABOLIQUES – Henri Georges Clouzot (1955)
Michel Delasalle est un tyran. Il dirige son épouse, sa maîtresse et son pensionnat pour garçons avec la même poigne de fer. Liées par une étrange amitié, les deux femmes se serrent les coudes. A coups d’images blanches comme des lames de couteaux, Henri-Georges Clouzot triture les miettes d’une histoire d’amour déchue. Impossible de comprendre comment « les diaboliques » ont pu succomber aux charmes autoritaires du directeur d’école. 

MANON – Henri-Georges Clouzot (1949)
« Quand l’idée de Manon s’est imposée, c’est que je cherchais une histoire sur les jeunes dans la guerre et dans l’après-guerre. C’est qu’en même temps j’avais sur le cœur certains tableaux de la Libération, c’est que l’asymétrie de l’amour de Desgrieux (Michel Auclair) à Manon (Cécile Aubry) correspondait à mes tiraillements avec Suzy (Delair), non pas comme dans le roman avec des positions… persistantes – masochisme et coquetterie – mais le manque de concordance existant. »


HENRI-GEORGES CLOUZOT : Première période (1907-1951)
Henri-Georges Clouzot voit le jour à Niort le 20 novembre 1907. Sa famille veut faire de lui un officier de marine. Il prépare l’École navale de Brest. Mais une myopie prononcée de l’œil gauche contrecarre ce projet. Par goût, il se tourne alors vers la diplomatie en étudiant le droit et les sciences politiques.

HENRI-GEORGES CLOUZOT – Deuxième période (1952-1977)
L’hiver 1950-1951. Passage difficile. De nouveau, Clouzot se heurte à des difficultés de toute sorte. Ses projets avortent les uns après les autres. Déçu, désœuvré, sans argent, Clouzot contacte son ami Jouvet et lui propose, impromptu, une adaptation cinématographique du Misanthrope avec Jouvet en Alceste et Fresnay en Philinte.

RENÉ CLAIR : LE POÈTE DE PARIS
René Clair a donné au cinéma quelques chefs-d’œuvre inoubliables, réussissant ainsi à décrire, à travers ses narrations visuelles, l’esprit de toute une époque. Quand René Clair réalisa en 1930 Sous les toits de Paris, son premier film parlant, il jouissait déjà d’une notoriété internationale grâce à ses films muets Entr’acte (1924) et Un Chapeau de paille d’Italie (1927).


[la IVe République et ses films] PAYSAGE APRES LA BATAILLE
Mai 1945, la France célèbre la victoire mais reste marquée par la fatigue, la pauvreté et la déception, tandis que l’épuration se poursuit. Malgré la condamnation de Pétain et l’exécution de Laval, les difficultés persistent. De Gaulle encourage la croyance en la grandeur nationale, même si le climat reste morose. Face à la concurrence artistique internationale et au passé controversé de certains écrivains, le cinéma apparaît comme un espoir pour la culture française d’après-guerre. Cependant, le secteur souffre d’un manque de moyens, d’infrastructures vétustes et d’une production jugée légère par un public avide de rêve hollywoodien, bien que les films réalisés à la fin de l’occupation aient montré des tentatives audacieuses malgré les difficultés.



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