Catégorie : Le Film Noir

THE STRANGE LOVE OF MARTHA IVERS (L’Emprise du crime) – Lewis Milestone (1946)

Le grotesque triangle amoureux formé par les trois protagonistes charge The Strange love of Martha Ivers d’implications noires. En effet, les personnages dans la mesure où leurs relations sont sous-tendues par la peur, la culpabilité ou la cruauté, sans oublier un romantisme excessif, sont caractérisés par un déséquilibre émotionnel. Masterson, joué par Heflin, a la fonction d’un catalyseur. Son arrivée provoque non seulement des bouleversements dans la vie quotidienne de la ville, mais aussi la mort de ses citoyens les plus importants. Milestone a voulu établir des affinités entre le sexe et la violence et mettre en scène les manipulations sadiques d’une femme fatale.

DOUBLE INDEMNITY (Assurance sur la mort) – Billy Wilder (1944)

Le film s’inspire d’un fait divers criminel authentique, l’assassinat en 1927, à New York, d’Albert Snyder par sa femme Ruth, aidée de Judd Crey, l’amant de celle-ci. Billy Wilder pensa tout d’abord à Alan Ladd et à George Raft pour interpréter Walter Neff. « J’ai eu, racontait-il, beaucoup de difficultés pour trouver un acteur. À cette époque, aucun de ceux qui étaient connus n’osait jouer un meurtrier. Lorsque j’ai raconté l’histoire à George Raft, il m’a dit qu’il voulait bien jouer le rôle si on découvrait, à la fin, que le personnage était en réalité un agent du FBI, ce qui lui permettrait d’arrêter sa maîtresse. »

CRY OF THE CITY (La Proie) – Robert Siodmak (1948)

Martin Rome a été blessé au cours d’un échange de coups de feu avec un policier qu’il a abattu. Cloué sur son lit d’hôpital, il est soupçonné par le lieutenant Candella d’un autre meurtre, assorti d’un vol de bijoux. Comme Rome, Candella vient de Little Italy, le quartier new-yorkais des immigrés italiens. Cry of the City (La Proie) fait partie des polars semi-documentaires dont s’enorgueillissait alors la 20th Century Fox.

LE FILM NOIR : UNE INVENTION FRANÇAISE

C’est au cours de l’été 1946 que le public français eut la révélation d’un nouveau type de film américain. En quelques semaines, de la mi-juillet à la fin du mois d’août, cinq films se succédèrent sur les écrans parisiens, qui avaient en commun une atmosphère insolite et cruelle, teintée d’un érotisme assez particulier : Le Faucon Maltais (The Maltese Falcon) de John Huston (31 juillet), Laura d’Otto Preminger (13 juillet), Adieu ma belle (Murder, My Sweet) d’Edward Dmytrick (31 juillet), Assurance sur la mort (Double indemnity)de Billy Wilder (31 juillet).

LES SEIGNEURS DU CRIME

Les « méchants », auxquels se heurtent les champions de la loi dans les années 40, prennent souvent le masque de la courtoisie. Mais leur nature profonde est en réalité totalement maléfique. Les années 40 furent l’âge d’or des acteurs de composition spécialisés dans le rôle du méchant, figure récurrente du film noir et du film policier de cette décennie. Les écrans se peuplèrent donc de génies du crime, cyniques, à l’humour sardonique, pleins de morgue et décidés à tout pour parvenir à leurs fins.

SORRY, WRONG NUMBER (Raccrochez c’est une erreur !) – Anatole Litvak (1948)

Par un kaléidoscope de flash-back avec voix off — figure majeure du film noir —, montés les uns après les autres ou imbriqués, le cinéaste pousse toutefois le genre dans ses retranchements. Il transforme le suspense d’origine en réflexion sur la folie, multipliant les interlocuteurs et les points de vue. Outre la composition névrotique de Barbara Stanwyck Double Indemnity (Assurance sur la mort, 1944), il n’est pas anodin que Sorry, wrong number soit l’exact contemporain d’un autre classique de Litvak,The Snake Pit (La Fosse aux serpents, 1948), l’une des premières fictions américaines se déroulant au sein d’un asile psychiatrique.

JOHNNY EAGER (Johnny, roi des gangsters) – Mervyn Le Roy (1942)

A mi-chemin entre le drame psychologique et le film traditionnel, Mervin Le Roy décrit deux mondes que tout semble opposer, s’attachant au passage aux femmes qui gravitent autour de Johnny et surtout au très curieux personnage de Jeff (Van Heflin, oscarisé pour ce rôle), l’historiographe du gangster pour lequel il a une évidente admiration. Robert Taylor n’est plus le séducteur du Roman de Marguerite Gauthier (Camille, 1936) mais un homme au double visage face à Lana Turner découvrant ici un univers trouble qui l’étonne et la fascine.