Le Film français

L’ASSASSIN HABITE AU 21 – Henri-Georges Clouzot (1942)

Paris est sous la menace d’un assassin qui laisse une ironique signature : Monsieur Durand. L’inspecteur Wens découvre que le coupable se cache parmi les clients de la pension Mimosas, au 21, avenue Junot… Un plateau de jeu (la pension), quel­ques pions colorés (ses habitants), et la partie de Cluedo peut commencer. Le ­roman s’ingéniait à égarer le lecteur détec­tive, de fausse piste en chausse-trape, jusqu’à la pirouette finale. Si le procédé est classique, façon Agatha Christie, le résul­tat à l’écran l’est beaucoup moins : goguenard, l’auteur croquait quelques belles tranches d’humanité. Pour son ­premier film, Clouzot adapte ce pessimisme ironique à son univers. Au passage, il prend quelques libertés. Occupation oblige, l’assassin, de Londres, déménage à Paris. Les héros du Dernier des six, précédente adaptation d’une œuvre de Steeman, sont chargés de l’enquête : l’inspecteur Wens (Pierre Fresnay, magistral) et son enquiquineuse de petite amie, Mila Malou (pétulante Suzy Delair). Mais surtout, entre humour et cruauté, le jeu policier prend un étrange et dérisoire relief, une véritable profondeur psychologique. Un régal, qui annonce un chef-d’œuvre à venir, Le Corbeau[Cécile Mury – Télérama]

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Le succès du film Le Dernier des six, réalisé par Georges Lacombe sur un scénario de Henri-Georges Clouzot, incite Alfred Greven, le directeur de la Continental-Films,  à produire une suite aux aventures policières du commissaire Wens et de sa compagne Mila-Malou. Greven accepte d’en confier la réalisation à Clouzot, son chef scénariste. Les risques commerciaux sont calculés ; le tandem Fresnay-Delair remplira de toute façon les salles. De nouveau, Clouzot s’inspire d’un roman de Stanislas-André Steeman, « L’assassin habite au 21 », et il propose à l’auteur de collaborer à l’adaptation. Celui-ci accepte de venir travailler à Paris : « Je ne me souviens pas sans émotion de notre amicale collaboration, à Clouzot et à moi. Non que cela allât tout seul. Nos tempéraments opposés s’affrontaient souvent et Clouzot est un de ces hommes impossibles à convaincre, à moins que vous n’ayez découvert le sentier dérobé qui vous conduit tout droit à leur clairière personnelle. Encore H.-G. Clouzot vous reproche-t-il d’avoir lambiné en route… « L’assassin habite au 21 » se déroulait à Londres, dans le brouillard, et j’aurais aimé en faire une symphonie en gris dans le style du Dr. Jekyll et Mr. Hyde. Si l’on veut bien se reporter aux événements d’alors, j’appris sans étonnement qu’il nous fallait situer l’action à Paris… Je m’inclinais… A priori, rien ne s’opposait à ce que M. Durand fit un assassin tout aussi présentable que M. Smith. Clouzot et moi travaillions dans un Paris occulté par 0°, haussant le ton des répliques pour nous réchauffer. La plupart des scènes furent composées d’un premier jet… Pour la fin, on a cafouillé…» [Clouzot Cinéaste – José-Louis Bocquet – Marc Godin – La Table Ronde (2011)]

Greven m’a demandé : « Est-ce que vous voulez entrer à la Continental, au bureau des scénarios ? » Je lui ai dit non. A ce moment-là, je me disais : je veux rester libre. Or je n’ai pas eu une offre de producteur français et crevant littéralement de faim, je suis entré à la Continental. (H-G Clouzot)

Le 4 mai 1942, Clouzot pénètre pour la première fois sur un plateau en tant que metteur en scène de long-métrage. Il a trente-cinq ans. Parmi les techniciens qu’il doit diriger, le preneur de son William-Robert Sivel. Il a le même âge que le réalisateur débutant, mais lui est déjà une légende. Comme preneur de son, il a été le benjamin de la légendaire Croisière jaune, l’expédition Citroën qui traversa la Chine dix ans auparavant. Depuis, il a travaillé sur dix-huit films et passe déjà pour un vétéran. Clouzot a fait sa connaissance sur le plateau du Dernier des six. Ils se sont bien entendus. Désormais, ils doivent travailler ensemble. Une quinzaine d’années plus tard, Sivel, toujours collaborateur de Clouzot, témoignera de la première journée de tournage de celui qui est devenu son ami : « Si vous l’aviez vu dans son premier film, les enfants! C’était L’assassin habite au 21… Il est arrivé vert de peur ! petit Georges, va !… En poussant la porte, le matin, il faisait dans sa culotte… Et le soir, les enfants ? Le soir du premier jour ? devinez ? Tous les gars du plateau étaient ratatinés ! Il les avait mis dans sa poche ! Je n’ai jamais vu ça ! En un jour… C’est quelqu’un, mon Georges ! » C’est ce premier jour, sur ce premier plateau à diriger que Clouzot s’est révélé à lui-même : si la réalisation est une affaire d’équipe, un cinéaste est avant tout un meneur d’hommes.  [Clouzot Cinéaste – José-Louis Bocquet – Marc Godin – La Table Ronde (2011)]

« J’aime l’action pour l’action, les contacts des hommes, des camarades, j’aime sûrement commander, mais on n’entraîne une troupe que dans la mesure où elle vous pousse en avant. Bien sûr, il y a des moments où le poids vous entraîne en arrière. Quand on est fatigué. » (H-G Clouzot)

Pour assister à ces premiers pas, Suzy Delair est aux premières loges : « Pour L’assassin habite au 21, il savait déjà admirablement faire son métier. Il connaissait les mouvements de caméra, tout était préparé d’avance : la colonne de gauche du scénario avec les dessins… C’était un homme complet, il avait appris avant, pas comme ceux de maintenant qui apprennent pendant ou après, quand c’est trop tard. Il travaillait avec Thirard qui était un opérateur extraordinaire. C’était formidable ! Cela se passait admirablement avec les acteurs ; il savait en tirer ce qu’il voulait. Il faut dire la vérité : nous n’avions droit qu’à deux prises, il n’y avait pas de pellicule. Il fallait être bien. Je ne me souviens pas de problème. Du moment que nous étions dans le rang, faisions les deux prises et arrivions à l’heure ! Évidemment, il n’y avait pas de feu, il fallait prendre le métro à cinq heures et demi du matin pour être maquillés et prêts à neuf heures à Billancourt. »

Outre le tandem vedette Fresnay-Delair, on trouve dans la distribution deux comédiens qui reviendront souvent devant la caméra de Clouzot, Pierre Larquey et Noël Roquevert. Larquey n’est plus un débutant. En 1941, il compte déjà une centaine de films à son actif. Les rôles que va lui confier le cinéaste vont pourtant réussir à dévoiler une facette inconnue du comédien. Roquevert, lui, n’a alors guère joué dans plus d’une quinzaine de longs métrages sans réellement se faire remarquer. Clouzot et lui s’étaient rencontrés sur le plateau des Inconnus dans la maison.  L’assassin habite au 21 va le rendre célèbre : « Nous avons travaillé dur pendant toute la réalisation de L’assassin habite au 21. Larquey, Tissier et moi étions conscients de l’importance de nos rôles. Il ne fallait pas rigoler. De toute façon, Clouzot ne l’aurait pas admis ». Dès ce premier film, Clouzot manifeste ses qualités de directeur d’acteurs qui le feront entrer dans la légende sous les traits d’un bourreau.

« Pour mettre les comédiens dans l’état d’angoisse nécessaire à la scène, il faut être angoissé soi-même. Ce qui importe chez le comédien, c’est qu’il entre dans l’état physique du personnage au moment donné. Là-dessus, je suis incapable de céder. Je ne peux pas supporter qu’on fabrique. Peu importe si la colère que je réclame a d’autres motivations que celles du rôle, il suffit qu’elle soit vraie. » (H-G Clouzot)

Pour tirer des larmes authentiques de Suzy Delair, Clouzot n’hésitera pas à piquer une violente colère, allant jusqu’à malmener physiquement celle qui partage alors sa vie. « Clouzot m’a giflée et alors ? Il en a giflé d’autres. Et alors ? Il n’obtenait pas le meilleur de ses acteurs qu’en les battant! Ce qu’il voulait, c’est… ce qu’il voulait ! Il était dur, mais je ne m’en plains pas. Le tournage a duré entre seize et dix-huit jours, cela n’a rien coûté du tout. Le film a été un triomphe, mais il est vrai que les cinémas, comme les théâtres ou les music-halls, étaient bourrés. » La revue Filmagazine consacre deux pages au film et interroge longuement le nouveau-né à la réalisation. Clouzot en profite pour esquisser sa théorie de l’auteur complet : « L’auteur de cinéma serait-il plus incapable que le dramaturge ou même le romancier à faire passer son idée de la conception à l’exécution ? Il y a pour ceux-là aussi des questions de technique qui jouent et remarquons bien que c’est seulement par elle qu’ils atteignent un certain style. Nos films auront un style quand ils seront l’œuvre non d’un seul, mais d’une équipe de techniciens, dirigée par un homme qui aura tout à la fois pensé et réalisé son sujet. Les problèmes d’appareils sont l’affaire des spécialistes. J’ai pu juger moi-même, en tournant L’Assassin habite au 21 avec un opérateur comme Thirard combien il était aisé de s’entendre. Nous n’avons jamais eu la moindre divergence de vues, la moindre discussion sur le plateau. Je reconnais d’ailleurs que je n’ai eu qu’à me louer de tous mes collaborateurs techniques et de mes interprètes. »

Le regard de Stanislas-André Steeman reste néanmoins mitigé : « Je n’assistais pas à la première de L’Assassin habite au 21. Je n’avais pas non plus assisté à celle du Dernier des six. Je vis le film dans un cinéma de quartier, à Bruxelles, et fus heureusement surpris de constater que l’on avait bien voulu garder le tiers de la moitié des gags sur lesquels j’avais sué (par bonheur) un mois durant. Le tiers de la moitié des moins bons, cela va sans dire. » Jean Cocteau, quant à lui, note dans son journal à la date du 9 septembre 1942 : « Vu le film de Clouzot, L’Assassin habite au 21. Il a eu raison de mettre en scène. C’est son écriture, comme les films de Pagnol sont l’écriture de Pagnol. Réussite. On voit un livre policier, plein de fautes, mais qui amuse beaucoup. » Huit jours plus tard, le poète protéiforme accompagne son ami Picasso au cinéma. Ils vont voir – revoir pour Cocteau – L’Assassin habite au 21 : « Picasso s’est amusé. J’ai remarqué que toutes les choses qu’on reproche au film lui plaisaient. » Cinq ans plus tard, au micro de la Tribune de Paris, le cinéaste déclarera que « L’Assassin habite au 21 était un exercice de style assez élémentaire ».


LA DISTRIBUTION

L’histoire

Un mystérieux assassin commet des meurtres en série et laisse sur chaque cadavre une carte de visite au nom de « M. Durand ». Le commissaire Wens (Pierre Fresnay) est chargé de l’enquête. Turelot (Raymond Bussières), cambrioleur interpellé dans la rue, est trouvé en possession d’une série des cartes de visite qu’il déclare avoir trouvées dans le grenier d’une pension de famille, 21, avenue Junot, à Montmartre. Wens vient louer une chambre à la pension, déguisé en pasteur. Sa maîtresse, Mila Malou (Suzy Delair), désireuse de faire la détective, s’y introduit à son tour. Une vieille fille, Mlle Cuq (Maximilienne), qui avait déclaré avoir une idée de roman policier, est assassinée dans la baignoire par « M. Durand ». Les soupçons de Wens se portent sur Colin (Pierre Larquey), un artisan en jouets mécaniques, qui est arrêté. Pendant que Colin se trouve en prison, « M. Durand» commet un nouveau meurtre. C’est un autre pensionnaire, le docteur Linz (Noël Roquevert), médecin militaire en retraite, qui est alors arrêté. Colin est relâché. Un troisième locataire de la pension, le fakir Lalah Poor (Jean Tissier), reçoit dans sa loge au music-hall la visite d’un journaliste, Bob Destirac (Guy Sloux ), qui prétend avoir découvert la vérité. Le cadavre de Destirac apparaît dans la malle du fakir, pendant son numéro en scène, avec la carte de « M. Durand » Lalah Poor est arrêté, Linz relâché. Mais « M. Durand» continue de tuer et il faut relâcher Lalah Poor. La propriétaire de la pension de famille, Mmme Point (Odette Talazac) donne une soirée pour fêter le retour de ses locataires : Mila Malou doit chanter. Wens qui, en lisant le programme, vient d’avoir la clé de l’énigme, est brusquement emmené par Lalah Poor, qui retrouve dans la rue ses associés, Linz et Colin. «M. Durand» était ces trois malfaiteurs agissant à tour de rôle afin que chacun paraisse innocent. Les trois hommes entraînent Wens dans un chantier où ils vont le tuer. Mais la police arrive, conduite par Mila Malou, qui avait compris elle aussi et qui avait retrouvé la piste de Wens.


HENRI-GEORGES CLOUZOT
Une personnalité mystérieuse et très controversée, une œuvre dont la noirceur et la cruauté ont rarement eu d’équivalent à l’écran : le moins que l’on puisse dire est que Clouzot ne laisse personne indifférent. Même ceux qui ne l’aiment pas reconnaissent en lui l’un des plus grands cinéastes du monde.

L’ÉLÉGANT PIERRE FRESNAY
Acteur à la diction parfaite et au jeu mesuré, Pierre Fresnay incarnera trente ans durant un certain idéal masculin, devant la caméra de cinéastes comme Abel Gance, Jean Renoir ou Henri-Georges Clouzot. Retour sur un parcours exemplaire.

LE CINÉMA FRANÇAIS SOUS L’OCCUPATION
Dès 1940, les Allemands entendent contrôler l’industrie cinématographique de la France occupée, et, surtout, favoriser l’exploitation de leurs propres films. Le cinéma français connaîtra pourtant une exceptionnelle vitalité. En juin 1940, après les quelques semaines de combats qui suivirent ce que l’on a appelé « la drôle de guerre », les Allemands occupent Paris, Le gouvernement du maréchal Pétain s’installe à Vichy, au sud de la Loire, et la France, coupée en deux, peut apparaître désormais comme un élément de l’ »Europe nouvelle » en cours d’édification…


Les extraits
Les critiques

Dans Ciné Mondial, le critique explique que L’Assassin habite au 21 « n’est pas une suite au Dernier des six mais une nouvelle aventure du détective Wens ». Très vite, il encense le travail de Clouzot : « Dans ce nouveau film, la réalisation a sa part dans la réussite. H.-G. Clouzot, néo-metteur en scène, mais scénariste qui connaît bien la question, a fignolé une mise en scène dense, concise, mobile, variée, mise au service d’une imagination féconde. Aucune scène n’est indifférente. Le dialogue insinue partout sont esprit. C’est de l’excellent travail de bon artisan. Audiberti dans Comoedia déclare le film « excellent » et se montre sensible à l’atmosphère : « L’Assassin habite au 21 est un film amusant au possible, découpé par un chirurgien « di primo cartello ». Son dialogue, non pas écrit, mais parlé, cadre parfaitement avec le mouvement des acteurs. L’atmosphère de l’ouvrage, dans l’ensemble, nous restitue les nuits de naguère, où vingt mille taxis cousaient et décousaient dans la capitale les lignes de l’aventure personnelle, que jalonnent des bistros pleins d’orateurs délavés et de filles étranges. Le métro regorgeait de géants, de sadiques, de bossus, de femmes nues, de doukhobors, de papes privés, de gorilles… »

Très bonne critique dans Le Film : « Le public retrouvera avec plaisir dans cet excellent film policier, digne continuateur du Dernier des six, le sympathique couple du commissaire Wens et de Mila-Malou. H.-G. Clouzot a fait avec ce film un très brillant début dans la mise en scène : l’aventure est contée et réalisée avec beaucoup d’habileté et le spectateur est saisi, dès les premières images, par une suite de scènes rapides, très colorées, d’un haut intérêt dramatique et accompagnées d’un dialogue corsé. Excellente interprétation : Pierre Fresnay retrouve les qualités qui l’ont fait briller dans Le Dernier des six. Suzy Delair manifeste, plus encore que dans ce premier film, ses dons et son tempérament remarquables de comédienne.

Projeté dès le 7 août 1942 en exclusivité au Biarritz, le film remporte un succès retentissant. Le public se rue en masse et L’Assassin habite au 21 réalise dans cette salle de cinq cent quatre places la recette record de 1 550 924F, représentant 61.619 entrées. Lors de la reprise du film en 1987, Pierre Murat dans Télérama se montre très lyrique : « Si l’individu social, chez Clouzot, est excusable, l’être humain, lui, par essence, est coupable. Dans L’Assassin habite au 21, le Mal devient cette Trinité qui poursuit sa route, de l’enfance à la mort, sans jamais se lasser. Aucun remords, aucun pardon, on ne saurait professer morale. Plus noire (plus lucide ?). Cette horreur des autres et de soi semble atténuée par la mise en scène rapide qui file (comme le Mal, elle court…), ces dialogues extraordinaires de brio et d’intelligence et les comédiens sublimes. »

Pour Michel Pérez, « L’Assassin habite au 21 n’est pas de ces chefs-d’œuvre intimidants qui font date dans l’histoire d’une cinématographie nationale. C’est un divertissement dénué de prétentions, solidement construit ». Il replace le film dans son contexte socio-historique : « Songeons à quel point l’anticonformisme peut régner sur ce film, alors qu’on se trouve en pleine période d’ordre moral vichyssois (d’aucuns prétendaient, il est vrai, que la compagnie allemande laissait la plus entière liberté de ton à ses scénaristes et à ses réalisateurs dans un but de démoralisation et qu’elle les incitait à donner de la France et des Français une image moralement négative). » Il conclut : «  De l’insolence, un brin de vulgarité parigote – « dans le quartier, il y a plus de pouffiasses que de pasteurs » -, de l’énergie et du dynamisme à revendre, le coup d’essai du père Clouzot n’est là pour nous rappeler que le cinéma français faisait preuve, au plus noir de la guerre, d’une surprenante vitalité. »

En 1991, un critique du Figaroscope décrit 21 comme un des meilleurs « polars » des années 1940… Déjà tout indique que Clouzot est un « grand ». A travers cette histoire, le cinéaste démontre qu’il a déjà un style et sa propre marque de fabrique : suspense très savamment agencé, peinture on ne peut plus noire de la société et superbe direction d’acteurs. Pour un coup d’essai, Clouzot signait là un coup de maître.  [Clouzot Cinéaste – José-Louis Bocquet – Marc Godin – La Table Ronde (2011)]


LE CORBEAU – Henri Georges Clouzot (1943)
Il pleut des lettres anonymes sur Saint-Robin, « un petit village ici ou ailleurs », et, comme l’annonce le narquois Dr Vorzet : « Quand ces saloperies se déclarent, on ne sait pas où elles s’arrêtent… » Tourné en 1943 à la Continental, dirigée par l’occupant allemand, ce deuxième film de Clouzot fut honni de tous.

QUAI DES ORFÈVRES – Henri-Georges Clouzot (1947)
« Rien n’est sale quand on s’aime », fera dire Clouzot à l’un de ses personnages dans Manon. Dans Quai des orfèvres, déjà, tout poisse, s’encrasse, sauf l’amour, qu’il soit filial, conjugal ou… lesbien. En effet, il n’y a pas que Brignon, le vieux cochon, qui est assassiné dans ce chef-d’œuvre. 

MANON – Henri-Georges Clouzot (1949)
« Quand l’idée de Manon s’est imposée, c’est que je cherchais une histoire sur les jeunes dans la guerre et dans l’après-guerre. C’est qu’en même temps j’avais sur le cœur certains tableaux de la Libération, c’est que l’asymétrie de l’amour de Desgrieux (Michel Auclair) à Manon (Cécile Aubry) correspondait à mes tiraillements avec Suzy (Delair), non pas comme dans le roman avec des positions… persistantes – masochisme et coquetterie – mais le manque de concordance existant. »

MIQUETTE ET SA MÈRE – Henri-Georges Clouzot (1950)
Henri-Georges Clouzot ne compte que quatre films à son actif, mais il fait déjà partie de l’élite des réalisateurs français. L’Assassin habite au 21 a été un grand succès public ; Le Corbeau bien que controversé  et Quai des orfèvres méritent le qualificatif de chefs-d’œuvre. Pour de nombreux exégètes de ClouzotMiquette et sa mère est considéré comme un passage à vide dans son œuvre.

LES DIABOLIQUES – Henri Georges Clouzot (1955)
Michel Delasalle est un tyran. Il dirige son épouse, sa maîtresse et son pensionnat pour garçons avec la même poigne de fer. Liées par une étrange amitié, les deux femmes se serrent les coudes. A coups d’images blanches comme des lames de couteaux, Henri-Georges Clouzot triture les miettes d’une histoire d’amour déchue. Impossible de comprendre comment « les diaboliques » ont pu succomber aux charmes autoritaires du directeur d’école. 

LA VÉRITÉ – Henri-Georges Clouzot (1960)
Tourné en pleine « bardolâtrie », La Vérité défraya la chronique. L’ogre Clouzot allait-il dévorer la star, qu’on venait de voir rieuse dans Babette s’en va-t-en guerre ? Après En cas de malheur, d’Autant-Lara, c’était son deuxiè­me grand rôle dramatique. Le succès fut à la hauteur du battage. Grand Prix du cinéma français, La Vérité décrocha un oscar à Hollywood.


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